Je n'ai pas eu l'heureuse fortune
d'être
juif." - 1915 -
"Quiconque nie le fait d'être juif pour se protéger joue le jeu des antisémites."
"J'ai l'intention de me rendre en Russie, parce que ce grand pays et ses
tentatives de reconstruction sociale pour sortir du chaos m'intéressent énormément." -
1921 -
"Je ne suis pas communiste, je suis un être humain, (...) Les communistes
ne sont différents de personne ; s'ils perdent un bras ou une jambe, ils souffrent
comme nous tous, (...) Je n'ai pas besoin d'être communiste pour savoir cela." -
1942 -
"Je suis un internationaliste, pas un nationaliste, et je ne changerai pas
de nationalité."
"Je ferai les films que j'aime parce que si j'aime quelque chose, il y a
de fortes chances pour que les enfants l'aiment aussi."
"C'est plutôt dictatorial de me dire
de quelle manière je devrais appliquer mon patriotisme. Je
suis patriote, j'ai été patriote de la même manière et je l'ai
montré. (...)
J'ai voyagé à travers le monde, et mon patriotisme n'est pas resté qu'à un
seul endroit, il est resté avec le monde entier, la compassion pour le
monde entier et les gens du peuple, et cela inclus ceux qui m'attribuent
cette sorte de patriotisme."
"L'horrible cruauté de l'Ancien Testament était dégradante pour l'esprit
humain."
"Un artiste devrait seulement être jugé par son art."
"Je donne six mois au parlant. Au maximum une année. Après, ce sera terminé."
"Ajouter des paroles à l'un de mes films reviendrait à ajouter de la peinture à une
statue."
"Je suis extraordinaire, je n'ai pas besoin de prise de vue extraordinaire"
"Ce personnage a plusieurs facettes ; c'est en même temps un vagabond, un
gentleman, un poète, un rêveur, un type esseulé, toujours épris de romanesque
et d'aventure. Il voudrait vous faire croire qu'il est un savant, un musicien,
un duc, un joueur de polo. Mais il ne dédaigne pas ramasser des mégots ni chiper
son sucre d'orge à un bébé. Et, bien sûr, si l'occasion se présente, il flanquera
volontiers un coup de pied dans le derrière d'une dame... mais uniquement s'il
est furieux !"
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Charlie
Chaplin
II
) Le personnage de Charlot :
Charlie Chaplin a crée un personnage aujourd'hui universellement connu :
celui d'une sorte de vagabond, dont le chapeau melon, la canne, les grandes chaussures,
le pantalon tombant et trop large, les cheveux frisés et la petite moustache
sont devenus le symbole de l'art cinématographique.
Le caractère le plus apparent de Charlot est celui d'une sorte de Pierrot
lunaire, amoureux platonique de quelque Colombine Américaine, poursuivi par,
les gros bandits, les gros méchants ( le contraste entre la fragilité physique
de Chaplin et la musculature de ses adversaires est constant et remarquable
).
C'est un personnage assez misérable qui essaye de composer avec le monde
hostile qui l'entoure , ses cambrioles ou ses trucs plus ou moins honnêtes. (
comme le fer à cheval placé dans le gant de boxe ou le coup de pied au derrière
lancé dans un geste de danseur .../... ). C'est un conquérant, sûr de
lui, dominant l'univers par l'idée qu'il s'en fait.
Il est aussi un personnage poétique, avec sa sensibilité et son lyrisme:
Le Chaplin amoureux : - de l'aveugle dans City Lights - ou - de
l'écuyère
dans The Circus. C'est un personnage marginal, clown et dramaturge.
C'est surtout l'aspect triomphant et dominateur de Chaplin qui
est remarquable. Quand il se bat, il gagne toujours ; les gros flics et
les gros bandits n'ont qu'à bien se tenir : Chaplin est invincible !
Mieux encore, il triomphe du monde, de la société (dans Golf Rush, il finit
milliardaire), du pire des dictateurs, dont il prend la place fortuitement.
Il est alors généreux pour les faibles, impitoyable pour ses adversaires
vaincus. David triomphe de Goliath comme il le mime d'une manière éblouissante
dans The Pilgrim.
III ) L'art de
Charlie Chaplin :
Chaplin est un acrobate,
un mime, un danseur, un comédien
hors paire. Son art, essentiellement visuel, se passe totalement
de la parole et des sous-titres. Il dira :
« Les Talkies ( films parlants ) vous pouvez
dire que je les déteste ! Ils viennent gâcher l'art
le plus ancien du monde, l'art de la pantomime. Ils anéantissent
la grande beauté du silence ».
« Je ne crois pas que ma voix puisse ajouter à l'une de mes comédies. Au
contraire, elle détruirait l'illusion que je veux créer, celle d'une petite silhouette
symbolique de la drôlerie, non un personnage réel mais une idée humoristique,
une abstraction comique ».

Modern Times, est le 1er film
de Chaplin où l'on pourra entendre sa voix. En réalité, il s'agit encore
pour l'essentiel d'un film muet. L'accompagnement musical, les éléments
d'ambiance sonore, et de temps en temps la voix sévère du directeur dans
laquelle travaille Chaplin ne sont que des éléments accessoires. Il y
a cependant un moment où Chaplin va, sinon moins parler, du moins chanter.
Mais, ce chant est lui même une sorte de pantomime. Les paroles de la
chanson n'appartiennent à aucune langue ; ce sont des jeux verbaux
dont la puissance évocatrice est aussi efficace que les mimiques gestuelles du
grand comédien.
Chaque geste, chaque battement de paupière, chaque cabriole à une signification,
s'intègre dans un développement rigoureux. Chaplin veut tout à la fois, faire
rire, émouvoir et faire penser. Il y parvient à un génie que nul n'a jamais égalé,
grâce en particulier, à son prodigieux talent d'acteur-danseur sur des morceaux
célèbres comme le ballet avec les machines dans Modern Times, est une
anthologie.
Il existe un dénominateur commun entre les décors, les choses et les êtres vivants
qui entourent Charlie Chaplin.
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A quelques très rares exceptions près, ce sont
des intérieurs ou des lieux bien délimités ( un café, un ring de boxe,
un arrêt de tramway, les coulisses d'un théâtre, une loge de concierge,
un banc de jardin, une banque... ).
Le monde extérieur, la nature reste toujours ignoré ; il ne se trouve jamais
confronté avec les près, les bois... Tout se passe comme si pour Chaplin, l'espace
infini n'existait pas. Seul est perceptible, l'étendu égocentrique ; ce
qui est en dehors de son champ de vision ou derrière son dos ( les manifestants
dans Modern Times ) ne le touchent pas ; ils les ignorent.
Sa perception du monde extérieure peut ressembler à celle d'un nouveau né ou
d'un schizophrène: elle est réduite mais concentrée; ce qui explique qu'il n'ait
peur de rien ni de personne.
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Les
décors des films de Chaplin :
Les
objets :
La relation de Chaplin avec l'univers extérieure se réalise par l'intermédiaire
d'objets particuliers ; le chapeau, la canne sont des prolongements du personnage.Dans
Charlot Policeman, il troque ses objets fétiches contre un casque et une
matraque et il arpente « la rue tranquille » ( Easy Street ) dans laquelle
se trouve un bec de gaz qui jouera un rôle capital ( un téléphone y est accroché...
). Les saucisses du charcutier qu'il traite comme des poignées de cuir auxquelles
on se suspend dans un tramway ( Pay Day ), des accessoires ( une
malle pleine de bouteilles d'alcool, une pièce de monnaie...).Au lieu de voir
se dérouler par ex le combat de l'homme et de la montagne, on
aperçoit que de petits incidents : une pierre qui roule, un pied qui glisse... Une
prise de vue sur des objets peut résumer une action.
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3)
Les personnages
Les personnages qui entourent Chaplin constituent une étonnante
galerie de portraits sur lesquels ont ne s'attarde jamais assez. Il ne
s'agit pas de
comparses, de faire valoir, mais d'êtres humains saisis dans leur rôle psychosocial,
décrit avec humour et une férocité sans égal dans l'histoire du Cinéma. Quand
une silhouette traverse l'écran, ne serait ce que quelques secondes, dans
un film de Chaplin, ce passage est toujours calculé, significatif, et à aucun
moment, la silhouette n'est conventionnelle. Toutes les classes de la société,
toutes les catégories professionnelles et à l'intérieur
de ces groupes, toutes les idéologies, tous les vices, tous les ridicules des
humains sont cernés, catalogués, passés en revue par une caméra implacable.
Dans Modern Times, les compagnons de chaînes dans l'usine inhumaine sont présentés
comme acceptant stupidement les impératifs de la Steel Compagny. Peu de personnages
trouvent grâce dans cette analyse sévère.
Chaplin le mal aimé part presque toujours seul, sur les routes de son éternel
vagabondage, et l'on compte sur les doigts d'une main les fins heureuses effectivement,
comme celle de Modern Times où il part la main dans la main, avec Paulette
Goddart, sur la route du destin.
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Modern
Times

Tournage
: Début 1932 jusqu’au 30 août
1935
Première : 5
février 1936
Distribution
: -
Charlie Chaplin : l'ouvrier
- Paulette Goddard : la gamine
- Henry Bergman : le
propriétaire du cabaret
- Allan Garcia : le
directeur de la compagnie
- Hank Mann : le voisin de
cellule
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Le dernier film
de Chaplin, avant le début de
la Deuxième guerre mondiale, Modern Times, dépassait le drame
individuel et annonçait la tragédie sociale. Ce n’était plus la destinée
d’un homme qui était en cause, mais le système social tout entier.
Dans les 1ères oeuvres, la contrainte extérieure était
présentée comme un mal que l’on pouvait éviter ou même combattre ;
elle était le fait de personnes individuelles : c’était un gros
masseur, un policeman, un personnage important qui menaçait l’intégrité de
l’homme de bonne volonté.
Dans Modern Times, la situation
est plus grave. Un processus inconnu s’est déclenché, et la contrainte est devenue
le fait du système et non de quelques individus particuliers. Ce n’est
plus un méchant flic qui vient matraquer les immigrants sous la statue
de la liberté, en apparence de sa propre initiative, c’est une voiture
de police, toute une organisation policière qui vient enchaîner l’individu.
Chaplin a donc ouvert le procès du système, après avoir clos celui
des individualités.
Mais
comme il n’est ni Marx, ni Lénine, son film ne peut être qu’un cri
de révolte, aussi bien contre l’immense et aseptique prison capitaliste
que contre le lourd système « bolchevique »comme on
l’appelait encore en 1936, aux États-Unis.

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Cependant, en Amérique, une nouvelle forme d’oppression
est née. Dans la société capitaliste, le moteur de l’oppression, c’est
la poursuite du bien être matériel chez les exploités, la recherche
de la toute puissance chez les exploiteurs : en 1935, l’Américain
moyen a retrouvé sa maison, sa voiture, ses appareils ménagers, ses
loisirs, sa bonne conscience puritaine.
Pour se faire, il adhère complètement au système
production / Consommation qui fait son relatif bonheur. Du moment qu’il
n’appartient au Black People, il ne souffre d’aucun manque. Il n’a
pas de problème métaphysique et n’a pas conscience d’être aliéné. (
Pour Marx, l’argent, le capital est l’aliénation de l’homme ).
Le
drame de l’homme prisonnier d’une société policière, industrialisée
se transforme en une tragédie horrible : ce n’est plus la prison
ni le chômage qui est à craindre mais l’avilissement et l’anéantissement.
Il ira plus loin dans la critique de l’état super-policier dans « Le
Dictateur » ( The Great Dictator ).
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Scénario :
Charlot travaille à la chaîne dans une usine gigantesque.
Il serre des boulons. Le directeur ordonne une augmentation de cadence.
Ne pouvant suivre le rythme, Charlot est happé dans le ventre de la
machine et roule entre les engrenages, rendu complètement fou, il se
met à danser au milieu de l'usine, à serrer tous ce qui lui fait penser à des
boulons, le nez de ces collègues, les boutons de la robe de la secrétaire,
jusqu'à ce que décision soit prise de l'évacuer dans un fourgon sanitaire.
Sorti de l'hôpital, Charlot
se retrouve sans travail. Suite à un malentendu lors d'une émeute de
grévistes, des policiers prennent Charlot pour le meneur et l'emmènent
en prison. Au réfectoire de la prison, Charlot absorbe par erreur de
la drogue qu'un voisin de table avait dissimulé dans une salière, et
c'est au moment de retourner dans sa cellule que Charlot, sans savoir
pourquoi ni comment, se retrouve dehors. Tentant de retourner dans
sa cellule, Charlot est témoin d'une tentative d'évasion et, à lui
tout seul, met fin à la mutinerie. En récompense, on lui offre une
cellule confortable en attendant sa libération.
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Une fois dehors, son seul souci est de
retourner en prison. Une gamine orpheline est arrêtée pour avoir volé du pain,
Charlot tente de se faire arrêter à sa place mais en vain. Il entre
alors dans un restaurant et avale tout ce qu'il peut avant d'appeler
un policier pour se faire arrêter, car il n'a pas un sou. Dans le fourgon,
il retrouve la gamine, mais la voiture a un accident et la petite en
profite pour se sauver en faisant signe à Charlot de la suivre. Il
hésite, puis se décide, et tous deux s'enfuient en courant.
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Charlot et la gamine sont installés dans une vieille
cabane. En lisant le journal, Charlot apprend que son usine est rouverte,
enfin du travail, mais à peine a-t-il commencé que les ouvriers se
mettent en grève. A nouveau à la rue, il se fait engager comme gardien
de nuit dans un grand magasin. La première nuit il invite la petite
orpheline dans le magasin, ils se restaurent à la cafétéria et s'amusent
dans le rayon des jouets. Au moment de pointer, abandonnant la gamine à l'étage
des chambres à coucher que Charlot tombe sur des cambrioleurs, parmi
eux, un ancien collègue de travail...
Le lendemain, Charlot est retrouvé endormi et
ivre au milieu du rayon lingerie, accusé de complicité ; il retourne
en prison.
A sa sortie, la gamine l'attend, elle
a trouvé un
emploi de danseuse dans un cabaret et présente Charlot à son patron
qui l'engage comme serveur et chanteur. Mais des fonctionnaires de
l'assistance publique veulent emmener la gamine orpheline et mineure.
Après
leur avoir échappé, Charlot et la gamine s'en vont ensemble, main dans
la main.
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